c comme cinéma

vendredi, avril 18, 2008


NO COUNTRY FOR OLD MEN ♦♦
Réalisation. ETHAN & JOEL COEN
USA – 2007 – 122 min.
Thriller

CAVALE SANS ISSUE

Les frères Coen aiment les causes désespérées et n’ont pas leur pareil pour les mettre en images. Rien d’étonnant dès lors à ce que le très « fargoesque » roman de Cormac McCarthy ait poussé les deux réalisateurs à adapter cette œuvre noire, la fuite en avant d’un homme dont la fortune mal acquise va se retourner irrémédiablement contre lui.
Et tout au long du film prédomine une froide violence, qui sera symbolisée d’un bout à l’autre par un magistral Javier Bardem dont le rôle de tueur psychopathe marque d’une empreinte rouge sang le récit. Son personnage, Anton Chigurh, abat sans la moindre pitié quiconque le gêne dans sa recherche du magot dérobé. Parfois face caméra, parfois hors champ, voire elliptique, chaque meurtre n’est qu’un pion supplémentaire sur l’échiquier macabre dressé par le criminel.
Mais alors que les trois quarts de l’histoire privilégient les longues séquences aux dialogues très limités et misent quasiment tout –même via les personnages secondaires- sur le duel à distance Javier Bardem/Josh Brolin, les deux frères brisent soudain cette harmonie en mettant un terme abrupt à la confrontation, loin des regards des spectateurs, quasiment à la sauvette. Limite scène coupée au montage. Et la fin laisse exactement la même sensation, d’autant que des sautes temporelles impromptues dans la narration ne rendent pas les choses très claires.
Vingt minutes de moins sans doute : voilà ce qu’il aurait fallu pour que cette épopée ne soit pas seulement sauvage mais aussi une incontournable du septième art.

3 Comments:

Blogger ThierryVW said...

Je vous propose de continuer "NOTRE duel à distance" sur le site de Ciné-cure, cher ami. Il est deux-trois choses qu'il vous faut absolument apprendre sur le cinéma.
"There will be blood" "The assassination of Jesse James..." et, dans une moindre mesure (quoique) le présent "No country..." participent tous trois du revival du cinéma américain des années 70. Celui de la contestation politique frontale, du refus de la mainmise des studios, d'une liberté créatrice inouïe, nourrie, entre autres, de la Nouvelle Vague européenne, celui qui embrasse son époque sans le moindre faux-semblant, la moindre concession, qui engendra notamment, vous devriez pourtant le savoir, un genre sur lequel vous aimez tant à affûter votre plume : le fantastique (le gore aussi). Sans la génération des movie brats et leurs successeurs, pas de Craven, Carpenter, Hopper... précurseurs du cinéma qui vous fait vibrer, cher Monsieur Clinckart. N'oubliez pas de contextualiser vos critiques, vous n'en aimerez que davantage ces films que vous jugez surtout trop "longs".
Un critique doit pouvoir aussi réfléchir plus de 80 minutes sur un long métrage dont le parti pris esthétique, la "lenteur", la chronologie "explosée ne sont pas le fruit du hasard, mais bien un véritable travail de cinéaste...

Bien à vous,

Thierry Van Wayenbergh

2:56 PM  
Blogger olivier said...

Revival du cinéma américain des années 70? Il faudrait urgemment que vous révisiez vos classiques, cher thierryvw, car ce cinéma que j'affectionne particulièrement n'avait rien à voir avec le spectacle que des films tels que There will be blood, No Country... ou The assassination of Jesse James, pour ne citer qu'eux, proposent. Vous le dites vous même: "parti pris esthétique"; voilà le choix fait par les réalisateurs des titres précités, au détriment des 3 choses essentielles qu'un très grand acteur français jugeait indispensables pour un film réussi: une bonne histoire, une bonne histoire, et une bonne histoire. Ce courant actuel estime donc qu'un grand film doit nécessairement dépasser les 2 heures et surtout, contenir des scènes d'une infinie longueur monotone justifiées par l'esthétisme de la mise en scène. "Que c'est beau!" s'exclamera donc le critique obsédé par la forme. "Que c'est ennuyeux" lui répondra le spectateur que le critique précédent dénommera dédaigneusement comme "populaire". Un film "fauché" peut ainsi se révéler bien plus passionnant que ces (très) longs métrages dans lesquels les cinéastes s'appliquent sur chaque couleur, chaque clignement de sourcil, chaque clapotis de l'eau que le héros regarde pendant d'interminables minutes en attendant (comme le public) que quelque chose se passe enfin. J'ai expliqué en détail dans mes critiques ce qui "cloche" dans les 3 films susmentionnés; je n'y reviendrai donc pas ici.
Vous qui affectionnez apparemment le revival des seventies, permettez-moi de vous conseiller vivement quelques films (2 ou 3 titres parmi bien d'autres qui me viennent à l'esprit) qui, eux, contiennent tous les éléments que vous prétendez voir dans les 3 titres que vous défendez avec énergie:
1)Perdita Durango, dans lequel Alex de la Iglesia emploie avec brio un sublime Javier Bardem dans son 1er vrai rôle aux USA (bien avant No country...)
2)Grindhouse: Death Proof, de Tarantino, superbe hommage aux séries Z des années 70
3)Jackie Brown, du même que le précédent, magnifique hommage à la Blaxploitation, à l'interprétation sublimée de (entre autres) Pam Grier, ancienne icône du genre.
Regardez-les bien et comparez-les à vos 3 "chefs-d'oeuvre": vous y trouverez, hormis la longueur variable, hormis l'esthétique savamment étudiée, hormis les innombrables références aux années 70, hormis les germes de contestation du système et l'indépendance du créateur, vous y trouverez, donc, un élément essentiel qui s'appelle LE RYTHME! Ce rythme qui vous scotche à votre fauteuil, ce rythme qui vous fait oublier que vous avez une montre au poignet, ce rythme qui efface tout baillement de votre bouche le temps de la projection. Ce rythme, indissociable du reste, qui fait que même les longueurs sont belles et justifiées et participent à la réussite globale du film.
Je n'ai, à mon regret, jamais trouvé la même osmose dans les 3 films que, en tant que lecteur visiblement très attaché à l'intellectualisme méprisant très tendance de certaines revues telles que Les inrockuptibles, vous encensez à tort et à travers. Je vous laisse donc volontiers somnoler sur le "véritable travail de cinéaste" que vous mentionnez, je retourne pour ma part à mon cinéma "populaire" mais tellement, tellement plus passionnant.

Bien à vous,

Olivier

6:18 PM  
Blogger ThierryVW said...

Vous me parlez de rythme, cher ami. Mais vous confondez "rythme" et "emportement". Dans votre présente "argumentation", tout comme dans votre critique pour le moins hâtive de l'immense "There will be blood". Sachez, pour votre gouverne, que les films "grindhouse" constituaient une très petite minorité de longs métrages aux Etats-Unis, effectivement le plus souvent fauchés, circulant sous le manteau, et diffusés dans les salles de "ciné bis" bien plus modestement que le "giallo" italien. Vous me peinez : ce cinéma bis - effectivement passionnant au demeurant - n'est en rien représentatif de ce que j'ai nommé "le cinéma américain des années 70". Cinéma, je le répète, de contestation, né de la volonté de faire table rase d'un certain cinéma hollywoodien hérité des studios, et en réaction au Vietnam et plus globalement à la politique de Nixon.
J'avoue ne pas bien vous suivre, tant vous semblez brouillon. Pourquoi en effet citer pêle-mêle Gabin (dont la "sortie" visait essentiellement un cinéma de genre typiquement français), les films grindhouse et la Blaxploitation pour évoquer la filiation bien tangible cependant avec le cinéma américain des années 70 ?!
Allez, je vous le concède, passe pour la blaxploitation, qui a investi la brèche ouverte par le cinéma de contestation dont je vous ai entretenu plus haut. Il n'empêche qu'elle en est également une expression très minoritaire.
Ne vous déplaise, les films que je vous ai cités, auxquels j'ajouterai volontiers "Into the wild" et "Zodiac" de Fincher sont bien les films les plus réjouissants sortis sur nos écrans dernièrement et témoignent de la santé retrouvée du meilleur cinéma américain qui soit : celui hérité des années 70. Celui des artisans qui filment en décors naturels, qui ont fait pour la plupart école chez l'inénarrable Roger Corman, malheureusement témoins d'une époque bouleversée.
Je vous laisse à vos à peu près, mais vous conseille cependant de relire votre histoire du cinéma.

Bien à vous,

Thierry Van Wayenbergh

8:44 PM  

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