c comme cinéma

mercredi, juillet 29, 2009

SEPT VIES ♦♦♦
(Seven Pounds)
Réalisation. GABRIELE MUCCINO
USA – 2008 – 123 min.
Drame

RÉDEMPTION

Ben Thomas est clairement hanté par un secret qui le tenaille sans cesse. C’est visiblement pour cela qu’il a décidé d’intervenir personnellement dans la vie de sept personnes différentes n’ayant aucune relation familiale ou amicale entre elles, mais toutes affectées par une maladie ou une infirmité handicapantes, ou par de gros besoins financiers.
Se faisant passer pour un agent du fisc américain, il parvient ainsi à pénétrer dans le quotidien de ces inconnus pour mettre son plan en place. Bien qu’il soit déterminé à rester le plus détaché possible par rapport à ces sept personnes, il ne peut s’empêcher de se sentir très attiré par la ravissante Emily Posa.


Will Smith et Gabriele Muccino se retrouvent après A la recherche du bonheur, et leur collaboration demeure fructueuse, grâce à cette histoire à l’atmosphère lancinante, teintée d’émotion d’un bout à l’autre.
Emotion mais aussi interrogation, car la majeure partie du film se déroule avec une question cruciale en filigrane: pourquoi le héros agit-il de la sorte, en cherchant à tout prix à venir au secours de ces sept inconnus très différents les uns des autres: un pianiste aveugle, une femme battue, une jeune cardiaque, …?
Sa démarche de bon Samaritain est aussi une quête rédemptrice, dont les tenants et les aboutissants seront révélés dans un final bouleversant où la tristesse cotoie l’espoir et surtout débouche sur un beau récit du don de soi.
Evitant toujours soigneusement l’écueil du larmoyant, Sept vies garde en permanence un côté fascinant, remarquablement servi il est vrai par un Will Smith au sommet de son art, alternant avec le même succès les blockbuster et les films independants, et accompagné par une Rosario Dawson impeccable, qui tient enfin là un rôle lui permettant d’exprimer pleinement ses capacités d’actrice dramatique.
Lent et énigmatique, Sept vies mérite largement qu’on s’y accroche, qu’on en décrypte peu à peu les éléments du puzzle qu’il constitue, pour mieux se laisser envahir par l’humanité profonde qu’il dégage. Une belle leçon de vie… ou plutôt de Sept vies.

L’ÉTRANGE HISTOIRE DE BENJAMIN BUTTON
(The curious case of Benjamin Button)
(2 étoiles)
Réalisation. DAVID FINCHER
USA – 2008 – 155 min.
Drame fantastique

UN HOMME SANS ÂGE

Quel curieux destin que celui de Benjamin Button! Dès sa naissance, il apparut qu’il ne serait pas quelqu’un comme les autres. Et pour cause: venu au monde avec le visage d’un vieillard de 80 ans, il fut abandonné par un père trop effrayé à l’idée d’élever un garçon pas comme les autres.
Ainsi, au fil de son enfance et de son adolescence, le physique de Benjamin ne cessa de rajeunir. Condamné à vivre dans un corps dont l’horloge interne s'est inversée, Benjamin fut bien obligé de s’accoutumer à sa différence au gré de ses rencontres et des événements qui jalonneront son existence.

David Fincher se démarque cette fois singulièrement du thriller –dans lequel il excelle- pour se plonger dans une fresque fantastico-romantique centrée autour d’un homme dont la croissance s’effectue à l’envers.
Or, à l’instar de Coppola et de L’homme sans âge, le réalisateur reste en partie bloqué par l’importance de l’enjeu, ne sachant visiblement trop quel aspect privilégier tant la matière à traiter était vaste.
Ainsi, Fincher imprime une atmosphère empreinte de mélancolie et de nostalgie à la pellicule, de même qu’il se livre à une réflexion sur le temps qui passe inéluctablement, laissant plus d’une fois l’émotion se frayer un chemin au fil des séquences décrivant l’amour impossible de deux êtres qui ne peuvent vieillir ensemble, puisque l’un des deux rajeunit constamment.
Mais la photographie superbe et les effets spéciaux étonnants qui transforment radicalement le joli couple Brad Pitt-Cate Blanchett –tous deux par ailleurs impeccables- ne suffisent pas entièrement à gommer le sentiment diffus que Fincher n’a pas su donner le relief nécessaire à son récit, à force de naviguer trop souvent entre réalisme et naïveté et de rallonger inutilement la sauce d’un film qui aurait grandement gagné en intensité s’il avait duré trente minutes de moins (d’autant que c’est d’une nouvelle, et non d’un roman, qu’il est tiré). Etrange histoire et étrange réalisation que celle-ci, qui fascinent tout autant qu'elles agacent.

CHE – 1ère partie: L’Argentin ♦♦
(Che: Part One)
Réalisation. STEVEN SODERBERGH
USA/France/Espagne – 2008 – 127 min.
Biopic

PREMIERS FAITS D’ARMES


Cuba, 1952 : le général Batista fomente un putsch, s'empare du pouvoir et annule les élections générales. Bravant ce dictateur corrompu, un jeune avocat, Fidel Castro, passe à l'action. Dans l'espoir de provoquer un soulèvement populaire, il attaque avec 150 jeunes la caserne de Monaca fin juillet 1953. L 'opération échoue ; Castro passe deux ans en prison. Amnistié en 1955, il s'exile à Mexico .
Pendant ce temps, au Guatemala , un jeune Argentin idéaliste, Ernesto Guevara, se lance en politique. Après une première prise de contact, il rejoint un groupuscule révolutionnaire cubain. En juillet 1955, Guevara se voit immédiatement confier une opération de guérilla en vue de renverser Batista. Les Cubains affublent le jeune rebelle d'un sobriquet courant en Argentine : «Che».


Projeté initialement au Festival de Cannes 2008, Che y avait connu une seule diffusion intégrale de plus de quatre heures. Se ravisant pour la sortie en salles, Soderbergh a préféré couper la poire en deux, et diviser son travail en deux épisodes de deux heures chacun. Mais son film en sort-il gagnant pour autant ?
Au vu de cette première partie, pas entièrement. Rien à reprocher à Benicio Del Toro, totalement habité par son incarnation du célèbre Cubano-Argentin, et qui permet ainsi au spectateur de suivre les débuts de la « carrière » du Che.
On peut néanmoins s’interroger sur plusieurs choix formels de Soderbergh. La durée tout d’abord, qui influe sur le fond. Ces deux premières heures sont trop longues, passant soigneusement en revue toute une série de faits d’armes certes intéressants pour les aficionados de Guevara, mais peu emballants pour le commun du public qui y verra de nombreuses redites.
Le style trop froid adopté par le réalisateur, ensuite. Sans espérer un film au rythme latino endiablé, on pouvait toutefois s’attendre à une biographie plus nerveuse et à des héros au caractère plus tranché. Or, aucun personnage ne se détache vraiment du portrait qui leur est consacré, Guevara apparaissant finalement très lisse, alors que cet homme controversé méritait une analyse plus creusée.
Il reste donc à attendre la seconde partie, celle de la Révolution cubaine, dont on ose croire qu’elle sera davantage à la hauteur de cette période de l’Histoire troublée qui marqua durablement les rapports de force de la région.

RELIGULOUS ♦♦
Réalisation. LARRY CHARLES
USA – 2008 – 101 min.
Documentaire

L’OPIUM DU PEUPLE


Bill Maher se livre à un long périple dont le but est de lui permettre de mieux comprendre les tenants et les aboutissants des différentes religions. Pourquoi croyons-nous? D’où nous vient ce besoin viscéral? La foi est-elle une maladie obsessionnelle?
En parcourant les Etats-Unis à la recherche de réponses, Bill va être amené à rencontrer de nouveaux acteurs de la vie religieuse, qu’ils soient chrétiens, juifs ou musulmans.


Bill Maher est loin d’être une célébrité chez nous, mais le comédien-animateur jouit d’une large notoriété Outre-Atlantique. Le film donnera au moins un aperçu de son côté rentre-dedans et de la manière imparable qu’il a de mettre ses interlocuteurs plutôt mal à l’aise.
Contraction de « religieux » et « ridicule », Religulous s’emploie donc à démontrer à quel point la religion peut devenir un instrument d’abrutissement des masses, selon la manière dont elle est interprétée. Intention louable à une époque de politiquement correct où des caricatures peuvent déboucher sur des émeutes sanglantes en ce début de 21e siècle qui, décidément, « sera religieux ou ne sera pas ».
La dénonciation débouche ainsi sur certaines séquences consternantes –voire effrayantes- quant à la propension de nombreux individus à tomber dans le panneau des vendeurs de bondieuseries, quitte à en nier obstinément et à l’encontre du bon sens toute réalité scientifique.
Mais à force de verser dans la satire, Religulous finit par pécher par ce qu’il dénonce. A savoir une démonstration qui rend mal à l’aise à force de saquer ferme dans le domaine du spirituel, sans grand discernement. On ne pouvait guère s’attendre à une perle de subtilité de la part du réalisateur de Borat, mais ce pamphlet très ironique finit par perdre une partie de sa crédibilité à force de trop taper sur le même clou de la croix.

LES NOCES REBELLES ♦♦
( Revolutionary Road )
Réalisation. SAM MENDES
USA – 2008 – 125 min.
Drame

REBELLES MAIS PAS TROP

Dans l’Amérique des années 50, Frank et April Wheeler ne veulent pas ressembler à n’importe quel autre couple d’Américains moyens. Bien décidés à baser leur existence sur des idéaux élevés, ils comptent bien, en emménageant dans leur maison de Revolutionary Road , ne pas se conformer à l’inertie banlieusarde qui prédomine.
Mais on a beau vouloir chasser le naturel, … Malgré toutes leurs bonnes résolutions, Frank et April ne peuvent résister indéfiniment au piège du quotidien et avant même de s’en rendre compte, lui se retrouve coincé dans un emploi qu’il n’aime pas tandis qu’elle doit se cantonner à un rôle de ménagère bien peu emballant.

Le couple mythique de Titanic se retrouve enfin à nouveau réuni, mais très loin cette fois d’une histoire d’amour immortelle, bien au contraire. C’est même au délitement progressif d’un mariage que le récit s’attache, dans le contexte bien précis d’une époque où le même mariage restait sacré.
Si le roman de Richard Yates duquel est tiré le film fit à juste titre forte sensation lorsqu’il parut en 1961, il est néanmoins difficile de retrouver la même force du propos quasiment un demi-siècle plus tard, alors que la conception du couple a changé radicalement. Ce qui donne dès lors au film de Sam Mendès un aspect un peu trop désuet par moments, aux longueurs inévitables.
Il n’empêche que la confrontation des deux acteurs principaux constitue un attrait indéniable. Car au-delà de l’époque où se situe le récit, l’amour qui s’étiole demeure un sujet universel et intemporel. Leonardo Di Caprio et Kate Winslet sont impeccables lorsqu’il s’agit d’incarner ces deux êtres que la passion des débuts a quitté et qui se retrouvent pris au piège d’une vie tragiquement monotone dans cette banlieue trop lisse, loin des rêves et des ambitions de jeunesse.
Dans une atmosphère feutrée fort bien rendue par Mendès, Les noces rebelles ne s’achève pas sur un happy end, mais sur le constat d’un échec annoncé. Dur mais réaliste, à l’image de ce couple qui n’a pas su se rebeller à temps contre les pièges du quotidien.

THE WOMEN ♦♦
Réalisation. DIANE ENGLISH
USA – 2008- 114 min.
Comédie dramatique

FEMMES DES ANNÉES 80… VERSION 2000

Mary est l’épouse de Stephen Haines, un homme d’affaires new yorkais. Fidèle à son époux et mère d’une fillette, elle est entourée d’amies appartenant au même milieu privilégié qu’elle.
Ce qui n’empêche évidemment nullement ces dames, entre deux après-midis de shopping, de se livrer au sport favori de la gent féminine: les potins en tous genres.
Le problème est que les amies en question savant quelque chose que Mary ignore

Il y a 70 ans déjà que George Cukor réalisait une première version de The women qui se voit donc réactualisé sept décennies plus tard.
Les temps ont certes changé depuis le siècle dernier, mais une caractéristique principale de la mise en scène demeure, dont on prend conscience après un moment: aucun représentant de la gent masculine n’est convié au générique, aussi bien parmi les rôles principaux que chez les figurants à l’arrière-plan!
Cette comédie 100% unisexe fait donc la part belle à la femme et à ses préoccupations majeures… du moins s’il faut en croire le scénario qui s’attache à décrire d’une façon très cliché le quotidien d’un groupe de pauvres jeunes femmes très riches qui, entre deux séances d’esthéticienne et deux virées dans les magasins de luxe, passent leur temps à papoter frénétiquement.
Or, si les hommes sont persona non grata devant la caméra, ils n’en demeurent pas moins un des sujets prinicpaux de conversations des héroïnes du film. Car de quoi parler d’autres entre copines, si ce n’est de ces fichus mâles qui leur rendent la vie impossible… mais dont elles ne peuvent se passer?
Tout cela est donc très léger mais se laisse regarder autant pour le défilé de comédiennes talentueuses que pour les situations plutôt cocasses qui jalonnent ce film féminin jusqu’au bout des pieds de la caméra.