c comme cinéma

vendredi, mars 07, 2008


CALIFORNIA DREAMIN’ (SANS FIN) ♦♦♦
( California dreamin’ (nesfârsit))
Réalisation. CRISTIAN NEMESCU
Roumanie – 2007 – 155 min.
Comédie dramatique

LE TRAIN S’ARRÊTERA 3 FOIS

California dreamin' est un film pas tout à fait comme les autres. En premier lieu parce que à cause d'un foutu coup du sort, son auteur, Cristian Nemescu, est mort dans un accident de voiture à 27 ans sans avoir eu le temps de finir le montage de son 1er -et donc dernier- long-métrage. C'est donc une version laissée telle quelle par les producteurs qui est proposée au public, d'où une longueur assez conséquente.
Inévitablement, cela se ressent de temps à autre, via quelques redondances que le cinéaste aurait gommé sans nul doute en ramenant la durée à des proportions plus raisonnables.
Mais il n'empêche: "uncut" ou pas, California dreamin' (sans fin) reste une histoire bougrement attrayante, un magnifique portrait d'un petit village du fin fond de la Roumanie sortant de sa torpeur pour accueillir avec une touchante naïveté –et la légendaire hospitalité locale- ses invités imprévus.
Ce qui donne lieu à un véritable choc des cultures hautement savoureux et un sacré numéro d'acteurs. La rencontre entre Armand Assante (le capitaine Jones) et l’excellent Razvan Vasilescu (le chef de gare) est le point d’orgue d’un récit qui, au travers de ses nombreux moments drôles, recèle aussi les blessures d’un peuple trop longtemps abandonné à son sort par l’Occident.
Un film universel porté par la justesse de ses propos, qui ne fait que regretter davantage la perte pour le 7e Art d'un talent aussi prometteur que Nemescu.


DÉTENTION SECRÈTE ♦♦♦
(Rendition)
Réalisation. GAVIN HOOD
USA – 2007 – 120 min.
Distribution:
Sortie en Belgique: 09/01/2008
Thriller
Enfants admis

DOSSIERS NOIRS

Quelques productions hollywoodiennes se démarquent régulièrement du triomphalisme guerrier américain. Après Le royaume, qui mettait déjà en exergue la complexité des rapports géo-stratégiques tout en intégrant une solide dose d’action au scénario, Détention secrète pousse la réflexion un cran plus loin en condamnant les méthodes pour le moins douteuses avec lesquelles le «pays de la liberté» traite toute personne suspectée de vagues liens avec les terroristes.
Menant plusieurs histoires parallèles en même temps, le film s’attache à différents protagonistes, dont les motivations divergentes se rejoignent pourtant sur un fil rouge ténu. Le message qui en découle est que l’extrémisme n’est pas l’apanage des seuls fanatiques religieux du Moyen Orient, mais est aussi bien ancré dans les esprits de certains fonctionnaires US . Les uns entraînant toujours plus de violence chez les autres et vice-versa.
Hormis le casting américain plutôt relevé, il faut souligner la présence marquante d’Omar Metwally, qui incarne brillamment un homme entraîné en plein cauchemar kafkaïen, ainsi que Yigal Naor, dont le personnage complexe traduit l’imbroglio généré par la situation.
La fin du film apporte un éclairage inattendu au déroulement de l’histoire, tout à l’honneur de l’excellent montage et de l’inspiration des interprètes. Un très bon dossier à ne surtout pas maintenir au secret.


CABALE À KABOUL ♦♦
Réalisation. DAN ALEXE
France/Belgique – 2007 – 87 min.
Documentaire

LES FRÈRES ENNEMIS

Bonne intention de départ que celle de Dan Alexe, qui a voulu fixer pour la postérité deux personnages hors normes, deux caractères bien trempés vivant leur vie dans un univers qui se résume à une cour intérieure et une vieille synagogue abandonnée.
Bonne idée aussi de donner, une fois n’est pas coutume, une image différente de Kaboul, loin des attentats-suicides et des conflits internes minant l’Afghanistan. Par le prisme de ces deux frères ennemis –en bisbille depuis que l’un aurait visiblement un peu trop renié sa judaïté du temps des talibans- c’est aussi l’histoire de deux êtres humains et des aléas de l’existence les ayant mené dans ce coin perdu, loin des leurs. Parfois drôle, souvent tendre, le récit se focalise sur ces deux hommes dont la querelle, en fin de compte, apparaît plus comme un passe-temps que comme une haine réelle.
A force de se focaliser sur Isaac et Zabulon, le réalisateur perd toutefois de vue certains éléments intéressants et donne l’impression que son film n’est qu’une partie d’un documentaire plus vaste. De fait, il explique lui-même avoir réalisé un premier docu sur le sujet dont les bobines furent volées à son retour en Europe . Du coup, il reprend son travail en cours de route, en oubliant que le spectateur n’était pas là lors de sa visite précédente. Un portrait avec un goût d’incomplet, donc, mais néanmoins très attachant.


LE RÊVE DE CASSANDRE ♦♦
(Cassandra’s dream)
Réalisation. WOODY ALLEN
USA – 2007 – 108 min.
Comédie policière

FRÈRES DE SANG

Woody Allen aurait-il délaissé son cher New York pour de bon? Le voilà en tout cas une nouvelle fois en Angleterre, là où il avait déjà posé ses caméras pour ses deux films précédents, Match point et Scoop.
Contrairement à ce dernier toutefois, le réalisateur se «contente» de la casquette de réalisateur, ce qui permet ainsi au duo vedette –Colin Farrell et Ewan McGregor- de donner la pleine mesure de leur talent dans cet affrontement fraternel provoqué par le très lourd secret qu’ils partagent.
Sans atteindre les sommets, Le rêve de Cassandre n’en constitue donc pas moins une bonne comédie noire, empreinte de cette différence des classes telle qu’on la ressent particulièrement Outre-Manche, et de tout ce que deux hommes sont prêts à faire pour garder cette part de rêve qui les maintient à flots. De légère au début, la tension dramatique monte crescendo jusqu’à imprégner complètement le film au fur et à mesure que les deux personnages principaux avancent dans l’impasse morale qu’ils ont suscitée.
Dommage dès lors que Allen décide d’apporter une conclusion aussi précipitée, dont le montage très sec est en contradiction avec le reste de la mise en scène. L’attachement que l’histoire développe pour les deux (anti)héros laissait espérer une fin moins abrupte. Mais il est vrai que les rêves, y compris celui de Cassandre, se terminent souvent brutalement.


BLACK SHEEP ♦♦
Réalisation. JONATHAN KING
Nouvelle-Zélande – 2006 – 87 min.
Comédie horrifique

DES AGNEAUX BÊÊH-HÊÊ-ÊTES ET MÉCHANTS

Jonathan King n’a pas hésité à rayer du dictionnaire l’expression “doux comme un agneau”, en transformant ces sympathiques pelotes de laine en vilaines bestioles complètement timbrées et avides de bonne viande humaine. Miam!
Ces quelques lignes auront donc suffi à vous éclairer: l’autodérision a envahi les prairies néo-zélandaises, terres moutonneuses par excellence, et cette série Z pétaradante ne se prive pas de multiplier les bons mots et les effets gore bien goupillés. Le film a d’ailleurs bénéficié d’un budget conséquent et de l’expertise de Weta Workshop (responsable des effets spéciaux de King Kong et du Seigneur des Anneaux, rien que ça!).
Pas de quoi s’attendre à des tonnes d’originalité: ça bêle dans tous les sens, mais Isolation, en 2006, exploitait déjà exactement le même créneau avec des… vaches mutantes. Décidément, nos braves animaux de la ferme sont soumis à rude épreuve!
Tout ça n’est donc vraiment pas sérieux, mais la durée relativement courte et la drôlerie des situations permet de passer un moment divertissant… avant d’aller, pourquoi pas?, déguster un bon gigot d’agneau!


LA QUESTION HUMAINE 0
Réalisation. NICOLAS KLOTZ
France – 2007 – 141 min.
Drame

INHUMAINEMENT ENNUYEUX

Nicolas Klotz a voulu développer –en se basant sur un livre- une réflexion à première vue hautement intéressante sur le monde de l’entreprise et les pratiques quasiment totalitaristes qui s’y déroulent et transforment les individus en simples numéros interchangeables.
Encore eût-il fallu que ladite réflexion ne prenne pas rapidement la forme d’un pensum long et laborieux duquel il ne faut pas longtemps pour se sentir complètement largué, au fur et à mesure que Klotz creuse son errance vers un parallèle très osé et hors de propos.
Car le postulat de La question humaine, c’est de démontrer que l’entreprise d’aujourd’hui est devenue, de par son ultra-libéralisme, un camp de concentration moderne. Comparaison outrancière et déplacée qui enlève au film toute faculté de recul, de même que la mise en scène s’enfonce dans une maladresse agaçante: séquences éclatées, narrations horripilantes (surtout la dernière), et personnages abandonnés en cours de route sans qu’on y comprenne quoi que ce soit.
Il n’y a guère que l’épatant Michael Lonsdale pour se tirer d’affaire et susciter les rares moments d’intérêt que ses acolytes, sans doute coincés par l’atmosphère ambiante, n’arrivent pas à générer. On sort fourbu de ces 2h21 épuisantes filmées égoïstement par un réalisateur surtout désireux de se parler à lui-même sans fournir le moindre mode d’emploi aux malheureux spectateurs.


HALLOWEEN ♦♦
Réalisation. ROB ZOMBIE
USA – 2007 – 106 min.
Horreur

UN ZOMBIE POUR HALLOWEEN

L’interminable série des Halloween avait depuis longtemps tellement viré au grotesque qu’un coup de couteau… euh, de balai bien salutaire était réclamé avec impatience pour dépoussiérer enfin les "exploits" de l’homme au masque.
C’est dire si Rob Zombie était attendu au tournant par nos plumes à l’affût de la moindre erreur de sa part pour l’assassiner littérairement. C’était se montrer là bien présomptueux! Car le réalisateur a réussi à se démarquer de tous les autres épisodes en décidant de repartir de zéro.
C’est donc un mélange assez réussi de préquelle et de remake qui redonne une santé à ce cher vieux Michael Myers. La première moitié du film s’attache en effet à décortiquer la triste enfance du monstre pour expliquer les événements l’ayant fait devenir expert en coutellerie. Une partie qui ne manque pas d’originalité, puisqu’elle désacralise le gaillard en lui donnant un visage –le jeune Daeg Faerch, vraiment flippant- et lui fait rencontrer le personnage du Docteur Loomis.
La seconde partie poursuit le jeu de massacre là où Carpenter l’avait commencé en 1978. Dès lors plus conventionnel puisque calqué assez fidèlement sur son modèle, le Halloween 2007 n’en conserve pas moins quelques scènes intéressantes filmées avec un sens assez aiguisé (forcément) de la mise en scène. Et maintenant que ce Zombie de Rob est devenu une fine lame, il ne serait pas surprenant que Michael Myers s’offre une 2e jeunesse!


BIENVENUE CHEZ LES ROBINSON ♦♦
(Meet the Robinsons)
Réalisation. STEPHEN J. ANDERSON
USA – 2007 – 102 min.
Dessin animé

LES ROBINSON DU FUTUR

A l’idée de voir Pixar et les studios Disney travailler ensemble, la curiosité se mêlait à une certaine crainte: la montagne n’allait-elle pas accoucher d’une souris? Ou ces 2 styles bien spécifiques ne se heurteraient-ils pas au moment de créer un nouveau dessin animé?
On peut être globalement rassuré: Bienvenue chez les Robinson ne manque pas de fantaisie et d’inventivité et le mélange des talents donne naissance à un travail assez particulier et une griffe bien spécifique.
Ce qui n’empêche pas le film de tâtonner un peu à la recherche de ses repères. Clairement destiné aux seuls mômes dans le premier tiers, il élargit ensuite son audience pour inclure un récit de science-fiction qui joue à fond –et assez habilement- sur le paradoxe temporel et son lot de surprises.
Les décors et les couleurs, quant à eux, sont autant de références aux oeuvres futuristes des années 50-60 qui imaginaient un avenir proche assez naïf entièrement géré par la technologie. Pour autant, l’animation se démarque de la quasi-perfection Pixarienne en se rapprochant davantage du dessin animé classique.
Assez intéressant dans la forme comme dans le fond –même si le concept des sacro-saintes valeurs à la Disney en remet parfois une couche de trop-, le film réunira petits et grands pour souhaiter la bienvenue à la famille Disney-Pixar.


LES ROIS DE LA GLISSE
(Surf’s up)
Réalisation. ASH BRANNON & CHRIS BUCK
USA – 2007 – 88 min.
Dessin animé

UN SURFEUR PAS MANCHOT

La production n’a pas manqué de préciser que Les rois de la glisse était déjà en projet avant que La marche de l’empereur et Happy feet ne sortent sur les écrans. Admettons… Il n’empêche quand même que cette production combine précisément les éléments des 2 films dont il ne s’inspire pas… officiellement: le côté dessin animé d’une part, l’aspect documentaire d’autre part. Même si, évidemment, il s’agit ici d’un faux docu censé glorifier les adeptes de la planche à glisse.
Voilà donc l’ami pingouin qui nous entraîne dans ses pérégrinations, en valorisant du même coup quelques belles valeurs telles que la persévérance et le dépassement de soi.
Mais ce qui frappe surtout, c’est la perfection technique de l’ouvrage: les vagues, les paysages, les mouvements des personnages, sont tout bonnement époustouflants et surfent sur les sommets en la matière.
Trop peut-être… car l’histoire n’a malheureusement pas bénéficié du même soin! Le rythme est terriblement mou et les scènes d’action en souffrent, créant du même coup un contraste criant entre le scénario peu emballant et le degré d’animation quasi parfait.
Dommage donc que la banquise ait quelque peu refroidi les ardeurs créatrices de l’équipe du film, il y avait pourtant matière à plongeon!


L’AUBERGE ROUGE
Réalisation. GERARD CRAWCZYK
France – 2007 – 99 min.
Comédie

ASSIETTE CREUSE

Il y avait de quoi craindre pour notre estomac en découvrant Gérard Crawczyk passer du statut de chauffeur des pitoyables Taxi à celui d’expert en gastronomie très particulière. D’autant plus lorsqu’il décide de s’attaquer au remake d’un grand classique du cinéma français.
A l’heure de passer à table, il faut donc bien constater que le repas du Chef Gérard manque singulièrement de sel! Non pas qu’il soit totalement indigeste, mais la mixture concoctée ne fait pas oublier une seconde le régal d’Autant-Lara, ni les “gueules” inégalables de Fernandel, Carette ou Françoise Rosay, que Jugnot, Balasko et Clavier ne parviennent pas à supplanter malgré leur talent certain.
Comme pour compenser cette perte inévitable, le scénario rajoute une flopée de personnages secondaires, destinés à une fin bien cruelle, mais dont les attitudes boulevardières donnent davantage l’impression d’assister à une pièce de théâtre filmé. Les dialogues et les scènes se voient quant à eux remis au goût de notre siècle: crachat de bile, allusions bien odorantes, …; on a connu des concoctions plus fines au palais!
Les décors soignés et la bonhomie générale rendent le repas comestible, mais sans grande surprise. Si les spectateurs ne connaissant pas la recette originale mangeront sans doute un repas honnête, les autres se diront que l’auberge était bien mieux tenue jadis.